La vraie indépendance du conseil

Quelle indépendance dans le conseil en placement ?

L’industrie financière a subi de nombreux bouleversements économiques et règlementaires ces dernières années. La gestion de fortune tant privée qu’institutionnelle a notamment dû faire face à une exigence croissante de transparence en matière de frais et a dû dévoiler les prestations de tiers perçues dans la cadre de ses activités.

La transparence n’est de loin pas encore totale, mais les premiers effets se sont rapidement fait sentir. Les frais de gestion ont commencé à diminuer et la pratique des rétrocessions a été freinée voir même, dans certains cas, éliminée. Afin de compenser cette perte de revenus, certains établissements bancaires ont introduit de nouveaux services payants tels le conseil en placement. On ne peut que saluer ces initiatives qui pourraient à terme encourager une séparation plus claire entre les activités de conseil et celles de gestion et de vente de produits au sein des banques. Cela permettrait également de réduire les conflits d’intérêts. Néanmoins, la facturation des prestations de conseil effectuées par des banquiers soulève de nombreuses questions..

Dans la pratique, il n’est pas rare que les propositions d’investissements des banques favorisent largement leurs propres produits ou les produits externes payant les rétrocessions les plus élevées. De plus, ces propositions sont souvent ni les plus performantes, ni les plus adéquates.. On peut légitimement se demander si le conseil payant fourni par des banques saura s’émanciper de cette manne de revenus souvent très rémunératrice  pour ceux qui les proposent.

L’industrie de la gestion, comme d’autres secteurs de l’économie est caractérisée par l’existence d’une grande asymétrie d’informations entre les fournisseurs de produits financiers et les consommateurs, soit les clients privés ou les investisseurs institutionnels tels les caisses de pensions ou fondations de bienfaisance. Cette asymétrie s’explique aisément par l’existence d’une multitude de produits financiers aux conditions souvent opaques promus par des spécialistes relativement bien formés et disposant de techniques de vente éprouvées face à des consommateurs souvent mal informés, manquant d’une base de comparaison et parfois d’un regard critique. A cela s’ajoute une relative méconnaissance de l’économie financière, puisque les concepts de base que sont le rendement, le risque ou la diversification restent encore des notions souvent floues pour de nombreux investisseurs.

Afin de réduire cette asymétrie, seul un acteur totalement neutre, expert, et faisant preuve d’intégrité et de transparence peut accompagner les investisseurs dans le choix de leur stratégie d’investissement et dans la sélection des fonds de placements. Le conseil en investissement, pour qu’il apporte une réelle valeur ajoutée aux investisseurs, doit être fourni par des spécialistes en finance disposant d’une solide formation académique, d’une grande expérience des marchés financiers, mais surtout de l’absence de tout conflit d’intérêt. Les meilleurs garants de l’indépendance d’un consultant en investissement sont sa rémunération, qui doit provenir uniquement de ses clients investisseurs et exclure toute rétrocession sur les produits recommandés, son actionnariat, indépendant de tous prestataires de services financiers et idéalement en mains de ses collaborateurs, et finalement l’absence d’activité de gestion. Seule cette totale absence de conflits d’intérêts garantit un conseil impartial  dans l’intérêt des investisseurs.

Malheureusement, la profession n’est pas (encore) réglementée et il n’est pas toujours aisé pour les investisseurs de distinguer les consultants réellement indépendants de ceux qui directement ou indirectement distribuent des produits financiers. Pour cette raison, de nombreux investisseurs privés ou institutionnels sont encore réticents à s’entourer d’un conseiller neutre qui défendra leurs intérêts. Toutefois, la multiplication des scandales financiers et le trend actuel en faveur de la meilleure gouvernance et de la transparence renforcent la valeur du conseil indépendant.

Texte co-écrit avec Pascal Frei, Associé PPCmetrics

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